Your heart out of your chest (ou l’expérience de la sensibilité)

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Image: Sachin Teng

Bon je commence par un mini coup de pub (boouuuuuh oui huez moi et lapidez moi avec des poireaux, je le mérite), mais j’ai ENFIN une page facebook! Si vous avez envie de suivre l’actualité du blog , n’hésitez pas à liker et partager, vous aurez droit à des bisous virtuels de ma part. (quelle chance!)

Voilà. Maintenant que j’ai profité de vous comme il se doit, revenons en au coeur du sujet (oui j’ai mis un titre en anglais. Je sais pas pourquoi mais je trouve que ça sonne beaucoup mieux comme ça, c’est comme les chansons en anglais, tu ne les traduis pas parce que sinon ça perd tout son charme)

Me revoici donc armé de mon clavier, une tasse de tisane de tilleul fraîchement cueuillie (c’est la saison en ce moment! Si vous avez des tilleuls près de chez vous, faites vous plaisir! C’est très facile à faire sécher en plus, il faut cueillir les fleurs et les espèces de longues feuilles vert clair qui pendent à côté, lorsque que quelques fleurs commencent à s’ouvrir sur le bouquet) pour vous parler de la …sensibilité. Cette vertu si controversée, qui peut être parfois une aide précieuse ,  souvent considérée comme une tare ou une malédiction par ceux qui la possèdent en trop grande quantité. Cette chose qui vous donne l’impression que soudain, quelqu’un vous extirpe le coeur de la poitrine, et tire, tire, et que toutes vos veines, tous vos nerfs encore reliés à l’organe palpitant frémissent et se tendent de toutes leurs forces pour ramener ledit organe à la place qui est sensée être la sienne. Cette exhalation, cette peur, cette tristesse, ces épines, ces brulures, éclats de glaces ou chaînes d’aciers, ces vagues de douceurs qui nous font monter les larmes aux yeux ou font passer l’arme à gauche à notre petite cervelle surchauffée par cet afflux de sensations et de sentiments. L’hyperempathie. L’art et la manière de pouvoir se mettre à la place d’autrui, au point qu’on se fonde en lui , au point d’en perdre parfois toute sensation du soi. Percevoir son amour, ses peurs, ses souffrances. Sa peine. Ses doutes.

J’ai toujours fui ces sensations étant petite. Je fermais les yeux devant tout ce que je percevais. S’en était trop pour moi , plus que je ne pouvais en supporter. Je parlais surtout avec les adultes. Je me sentais séparée de ceux de mon âge. Je pleurais, beaucoup et souvent. J’avais l’impression de comprendre exactement pourquoi telle personne agissait de la sorte, pourquoi elle parlait de cette manière, ce que cela cachait. J’étais malade trois jours avant de partir en colonie de vacances, tellement ça me faisait peur. Je me sentais lacérée, trahie, submergée par une tristesse et une colère infinie pour des choses qui ne causaient à autrui qu’un froncement de sourcil. Etait-ce moi? Est ce que je faisais des idées sur les autres? Est ce que je pensais comprendre, mais que je n’étais au final que dans mon monde, que tout ce que je m’imaginais sur autrui était une simple projection de mes délires d’enfant solitaire?

Ces questions bourdonnaient tout autour de moi comme un essaim de moustiques affamés, ne me laissaient aucun répit. Comment faire confiance à mes sensations dans ce cas, puis-ce que tout n’est peut être qu’un pur délire? J’ai continué à fuir.

Je me sentais mal lorsque les gens qui m’entouraient se sentaient mal. Au point que j’en tombais malade, parfois. Je dormais très mal, mes rêves étaient entrecoupés de rêves en sursaut, de crises de somnambulisme. Des rêves étranges, comme si je plongeais au coeur d’autrui. Cette fois ou je me suis littéralement sentie glisser dans autrui le temps d’un battement de coeur, à l’orée du sommeil. Le ressentir le temps d’un éclair, comme si j’étais lui . Et puis l’obscurité qui te cueille dans ses griffes, cette chanson terrible que tu chantes une nuit, entrecoupée de tremblements et de sursauts; tu t’aperçois le lendemain que cette nuit là était celle qu’avait passé ton meilleur ami dans l’appartement de sa mère, morte il y a quelques jours. Et que cette chanson correspond en tous points à la situations à laquelle il a été confronté.

Mais tu continues à dénier, malgré toutes les coïncidences qui s’accumulent, tu veux rester saine d’esprit. Les flèches continuent à transpercer ton petit Toi, sans aucune autre préoccupation pour ta petite personne que ne l’a la grêle pour les arbres en fleurs.

Les terreurs, les obscurités. Mais aussi la beauté. Tellement cinglante que parfois tu te mets à pleurer sans que tu saches pourquoi. Comme ce week-end, ou tu as été voir la livre de Kells , pour la dixième fois. Un livre d’enluminures sublime, une oeuvre d’une finesse, d’une perfection incroyable, ciselé comme un bijou, paré d’encres d’émeraude, de sang, d’or et de saphir. Une énergie tellement puissante que tu te retrouve frappée de plein fouet. Je n’ai pas pu rester, sinon j’allais me mettre à pleurer. Oui, encore.

Jusqu’au jour ou j’en suis arrivée à la spiritualité. Et là, d’un seul coup, je me suis aperçue que cette vertu pouvait être apprivoisée, comprise, utilisée, catalysée. Que je devais réapprendre à faire confiance à ces sensations. Que je devais les travailler, que les choses avaient finalement du sens . Que nous étions réellement connectés. Au monde qui nous entoure, au vivant dans toute sa splendeur, et que notre survie dépendait de la manière dont nous tissons ces liens et de la force que nous leur donnons.

J’ai réappris à orienter mon questionnement. A mettre de côté toutes ces bullshits avec lesquelles on m’avait lentement aliénée , muselée, martelée pour en faire un joli petit humain qui rentrerait parfaitement dans ce que veut la société. J’ai réappris à me faire confiance. Croyez en vos intuitions; faites confiance à votre instinct. Il vous a appris à survivre durant des millénaires, à reconnaitre la bonne nourriture, à trouver un abri, à fabriquer des outils, à chasser, il vous a appris l’art, la musique, le rythme des saisons, de la lune et du soleil. Vos sensations sont votre lien au monde. Et si vous avez l’impression que le monde entier n’est pas d’accord, c’est peut être parce que c’est le monde entier qui est muselé. Les gens se réveillent petit à petit, reprennent contact avec leur intuition. Tu le sais quand tu fais quelque chose de bien (bien, pas dans le sens chrétien du mot, mais plutôt dans le sens de bien commun, pour le Tout, le Dharma) . Tu le sais parce que tu le sens dans tes tripes. Tu as l’impression d’être portée dans ce sens.

Mais comment être sur qu’on ne s’entoure pas d’illusions?

Les oracles sont une bonne remise en question. Tu les tires, et tu vois direct si tu es partie dans ton délire. Autrement, il faut essayer de s’ouvrir. Laisser couler les choses en soi, à travers soi, sans s’enfermer en soi même. Renouer le contact avec l’extérieur, parce qu’ainsi on y trouve un miroir à ce qu’on ressent, une confirmation, un retour. Qui nous assure que nous ne sommes pas seuls, jamais.

2 réflexions sur “Your heart out of your chest (ou l’expérience de la sensibilité)

  1. Tasagi,
    De retour sur le forum païen que j’ai délaissé un temps, j’ai constaté que tu n’y viens plus beaucoup et j’ai tout de suite pris l’initiative de visiter ton blog !!! Magnifique, super, que dire, j’adore !!!

    Comme tu le dis très bien à la fin de cet article, nous ne sommes pas seules, je me suis totalement retrouvée dans ton article !!! Comme tu exprimes bien les déchirures de la chair, la douleur et l’envie de hurler quand on a mal, quand on sens qu’un proche a mal !!
    Comme tu exprimes bien ce lien à l’énergie du Tout !!
    Merci pour cet articles Tasagi, continues j’adore !!
    Celëndwynn

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    • roooh merci ❤ franchement tu peux pas savoir à quel point ça me fait plaisir ce petit message! Heureuse que ça t'ai parlé, c'est pas toujours facile de continuer , parfois on a l'impression de ne pas avoir de retour et de crier sa souffrance dans le vide, ce genre de petite confirmation qu'on est pas tout seul donne du baume au coeur! Bonne journée a toi 😉

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